Aucune valeur instrumentale ne caractérise les conditions physico-chimiques de l’Océan Pacifique tropical avant le milieu du siècle précédent. Il s’agit pourtant d’une zone-clé du système climatique global, qui connaît la variation majeure du climat à l’échelle humaine, El Niño. La variation naturelle, en terme quantitatif, du climat avant la révolution industrielle comme celle enregistrée durant les premières modifications causées par l’effet anthropique, sont donc totalement ignorées.

Les facteurs environnementaux inscrits sous forme de paramètres géochimiques au sein de l’aragonite du squelette de coraux tropicaux s’imposent comme les traceurs indirects incontournables qui permettent des reconstitutions des variations climatiques de cette zone tropicale. Le squelette des coraux massifs présente les caractéristiques nécessaires aux enregistrements des fluctuations du climat du passé récent, c’est à dire les derniers siècles. Néanmoins, la chronologie facilitée par des anneaux de densité, qui trahissent une cyclicité annuelle et dont l’épaisseur permet une résolution mensuelle, ne suffit pas pour en faire le traceur climatique idéal. En effet, la conversion des valeurs géochimiques en termes environnementaux se fait traditionnellement par une méthode empirique qui n’est pas en adéquation avec la précision à laquelle doivent s’effectuer des reconstitutions quantitatives précises, au plus proche des mesures instrumentales.

Dès la découverte du thermomètre isotopique, Urey émettait en 1951 des réserves sur la capacité de cet outil en évoquant "l’effet vital" du carbonate de calcium des organismes que reflétaient pour lui des anomalies isotopiques par rapport au thermomètre isotopique du CaCO₃ inorganique, dues à l’activité biologique. Après une brève évocation du corail et de ses caractéristiques essentielles, je montrerai comment, grâce à la culture de coraux dans des conditions contrôlées, la lumière s’est révélée comme l’un des facteurs oublié lors de la détermination de d¹⁸O ainsi que le lien étroit qui existe entre la croissance et le traceur géochimique. Cette première démonstration s’effectue sur des échantillons de taille macro-métrique (quelques mm³) comparable aux échantillons effectués lors des reconstitutions climatiques.