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Recherche en eau souterraine dans un environnement pergélisolé en voie de dégradation pour l’alimentation durable en eau potable des communautés inuites au Québec nordique, Canada.
Richard Fortier
Département de géologie et de génie géologique, Université Laval, Québec, Canada.
Thu, Apr. 20th 2017, 11:00-12:00
Bât. 701, P. 17C, LSCE Orme des Merisiers

L’accès à l’eau potable est fondamental pour le développement durable des communautés isolées aux hautes latitudes nordiques. Parmi les quatorze communautés inuites au Québec nordique, Canada, douze dépendent des eaux de surface pour leur alimentation en eau potable alors que seulement deux de ces communautés exploitent plutôt l’eau souterraine dans des aquifères fracturés. Bien que les lacs et les rivières soient abondants au Québec nordique, ils sont vulnérables à la contamination et à leur tarissement lors du gel hivernal. Même si l’eau souterraine est reconnue comme une source d’eau potable plus fiable et plus sécuritaire que les eaux de surface, en étant emprisonnée sous la forme de glace de sol dans le pergélisol ou en étant dans des aquifères dont la recharge est limitée par le pergélisol imperméable, la disponibilité de cette ressource en eau potable peut être très faible en régions nordiques. Cependant, parmi l’un des rares impacts positifs associés au réchauffement climatique anticipé lors des prochaines décennies, la dégradation du pergélisol pourrait être à l’origine d’une augmentation de la disponibilité en eau souterraine suite à la libération de l’eau de fonte de la glace de sol et à la recharge facilitée des aquifères par l’infiltration de l’eau dans les couches de sol dégelé. L’exploitation des eaux souterraines en régions nordiques devient donc envisageable pour alimenter en eau potable les communautés.

Afin de développer une expertise en hydrogéologie des régions froides propre à la réalité du Québec nordique, un petit bassin versant de 2 km2 dans la zone de pergélisol discontinu près de la communauté inuite d’Umiujaq sur la côte est de la Baie d’Hudson fait l’objet d’une étude exhaustive. Les objectifs de cette étude sont d’évaluer la qualité et la quantité de l’eau souterraine dans ce bassin versant, d’assurer le suivi de cette ressource naturelle, et de mesurer et d’anticiper les impacts du réchauffement climatique sur le pergélisol et la ressource en eau souterraine. Des sédiments d’origine glaciaire et marine de plus de 30 m d’épaisseur qui reposent sur le socle rocheux se sont déposés dans ce bassin versant. Des îlots de pergélisol se sont formés dans l’unité de silts déposés en eau profonde lors de la transgression marine alors qu’un aquifère profond confiné par cette unité se trouve dans des sables et graviers fluvioglaciaires et dans le till. Un réseau de neuf puits d’observation des eaux souterraines et de trois puits de mesure de la température du sol dans sept sites libres de pergélisol a été installé dans ce bassin versant lors d’une campagne de forage à l’été 2012. Ce réseau est complété par plusieurs puits de mesure de la température dans le pergélisol, deux stations climatologiques, un pluviomètre-nivéomètre et une station de jaugeage à l’exutoire du bassin versant.

Des travaux de modélisation numérique des processus couplés de la transmission de la chaleur et de l’écoulement de l’eau souterraine afin d’anticiper les impacts du réchauffement climatique sur la dégradation du pergélisol et sur l’écoulement de l’eau souterraine sont en cours. À cet effet, un modèle cryohydrogéologique tridimensionnel réaliste du bassin versant a été construit dans GoCAD à partir des résultats d’une investigation géophysique du bassin versant dont notamment des tomographies de polarisation provoquée et de sismique réfraction ainsi que des profils de géoradar, de la carte des dépôts quaternaires, d’un modèle numérique d’élévation à haute résolution du bassin versant et des descriptions de forage. Selon les analyses hydrogéochimiques effectuées sur des échantillons d’eau prélevés dans ce bassin versant, l’eau souterraine est d’excellente qualité même si elle est appauvrie et que son temps de résidence dans l’aquifère profond est court. Un bilan hydraulique à l’échelle du bassin a aussi été réalisé. Ces connaissances sur l’hydrogéologie du bassin versant sont utilisées pour contraindre la modélisation numérique et évaluer les impacts du réchauffement climatique sur la ressource en eau souterraine dans ce bassin versant en régions nordiques.

BIOGRAPHIE DE RICHARD FORTIER

Richard Fortier est professeur titulaire au Département de géologie et de génie géologique de l’Université Laval. Il est aussi membre-chercheur du Centre d’études nordiques de l’Université Laval. Il est ingénieur physicien de formation spécialisé en géophysique et géotechnique des régions froides. Ses intérêts de recherche portent sur l’auscultation par méthodes géophysiques et géotechniques des milieux gelés en permanence (pergélisol), l’étude de la dégradation du pergélisol sur les milieux naturels, les infrastructures nordiques et les eaux souterraines, et la modélisation numérique des processus thermo-hydro-mécaniques qui prennent place dans le pergélisol en voie de dégradation.

Pour son présent séjour au LSCE dans le cadre d’une année d’étude et de recherche, Richard Fortier a obtenu une bourse de mobilité de l’Unité mixte internationale Takuvik. Ce partenariat entre le CRNS et l’Université Laval a pour principal objectif de mieux comprendre l’impact des perturbations environnementales actuelles d’origine climatique et anthropique sur les écosystèmes et géosystèmes arctiques, marins et terrestres.

Contact : Juliette Lathiere
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