Renoncer à exploiter les deux tiers des réserves de combustible fossile actuellement prouvées ? Alors qu’a lieu le 23 septembre le sommet climat de l’ONU à New-York, les laboratoires associés au Global Carbon Project (GCP) publient quatre articles identifiant les défis sociétaux qui permettraient de maintenir le réchauffement moyen global à moins de 2 °C en 2100 par rapport au niveau pré-industriel. En France, le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (CEA/CNRS/UVSQ) est associé à ces résultats importants.
Les émissions mondiales de dioxyde de carbone provenant des combustibles fossiles et de la production de ciment ont augmenté de 2,3 % entre 2012 et 2013, atteignant un niveau record de 36 milliards de tonnes de CO2. En 2014, les émissions devraient encore augmenter de 2,5 %, ce qui les place à 65 % au-dessus du niveau de 1990. Ces données sont publiées en ligne sur le Global Carbon Atlas www.globalcarbonatlas) une plateforme web développée au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) avec le soutien de la Fondation BNP Paribas, et avec le concours d’une trentaine de laboratoires du monde entier[1].
Les quatre pays les plus grands émetteurs de CO2 sont :
« Il y a une augmentation globale importante et continue au niveau mondial, explique Philippe Ciais, chercheur au LSCE. En Europe, la diminution s’explique par une stagnation économique et cela malgré une augmentation de l’utilisation du charbon en Pologne, en Allemagne et en Finlande. »
« La Chine émet désormais plus que les Etats-Unis et l'Union Européenne réunies et les émissions de CO2 par personne y sont de 45 % plus élevées que la moyenne mondiale, dépassant même la moyenne de l'Union Européenne, poursuit Philippe Ciais. La Chine pesant de plus en plus lourd dans ce bilan, elle devient un acteur incontournable dans les négociations internationales sur le climat et l’énergie. »
Selon les résultats publiés, l’humanité devrait limiter ses émissions dans le futur à un maximum cumulé de 1200 milliards de tonnes de CO2 (calculé à partir de 2015) pour rester en-dessous d’un réchauffement global de 2 °C en 2100, par rapport au niveau pré-industriel. « Avec des taux d'émission actuels, ce 'quota' sera atteint dans 30 ans environ (une génération), explique Philippe Ciais. Pour rester sous les 2°C, il faudrait réduire nos émissions au niveau mondial de 7 % chaque année. Ce taux global de réduction devra sans doute être négocié et modulé en fonction du niveau de développement économique et technologique des différents pays. » Les résultats du Global Carbon Project montrent qu’il faudrait alors renoncer à exploiter les deux tiers des réserves de combustible fossile actuellement prouvées.
Selon le Global Carbon project, il existe un risque réel que ces objectifs ne puissent être atteints par exemple par défaut de maturité et de mise en œuvre des technologies de captage et de stockage du carbone. Si ces technologies sont disponibles trop tardivement, il faudrait alors qu’elles soient utilisées de façon intensive pour retirer du CO2 de l’atmosphère (émissions négatives).
Le Global Carbon Project est un projet du Earth System Science Partnership, qui a pour objectif d’encourager la coopération internationale dans la recherche sur le cycle du carbone. Il produit notamment un rapport annuel comprenant les chiffres des échanges de carbone qui résultent de l’activité humaine.
[1] Ces données sont publiées dans Lequéré et al. (2013) pour les emissions de 2013 et accessibles sur le Global Carbon Atlas - www.globalcarbonatlas.org, un outil créé par les équipes du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (Patrick Brockmann, Vanessa Maigne, Anna Peregon avec la société Wedodata) avec le soutien de la Fondation BNP Paribas.