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Les lacs proglaciaires : sources d’instabilités de grande ampleur pour les calottes polaires  

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Le recul des glaciers et des calottes polaires favorise le développement de lacs. Notamment, les lacs proglaciaires se forment dans les dépressions topographiques situées à l’aval des glaciers. Au cours de la dernière déglaciation ces lacs étaient nombreux dans l’Hémisphère Nord et pouvaient atteindre des tailles considérables. Par exemple le lac Agassiz-Ojibway qui bordait la marge sud de la calotte polaire Nord Américaine avait une étendue d’environ 1,5 million de km², soit l’équivalent à la superficie du Portugal, de l’Espagne, de la France et de l’Allemagne réunies. L’importance que ces lacs ont pu avoir sur l’évolution du climat est largement reconnu mais leur rôle sur la dynamique des écoulements glaciaires n’avait jamais été quantifié jusqu’à présent.

Pour cette étude nous avons utilisé un ensemble de simulations numériques qui couvrent la période de la dernière déglaciation pour étudier le rôle des lacs proglaciaires sur la dynamique de la calotte Nord Américaine. Nous avons pu montrer que les lacs pouvaient conduire à des instabilités mécaniques grande échelle pouvant expliquer la moitié des pertes de masse lorsque cette calotte recule dans la région de la Baie d’Hudson actuelle.

Ce mécanisme s’explique par le fait que la ligne d’échouage, c’est à dire la transition entre la glace posée et la glace flottante, est en situation instable lorsque le socle rocheux présente une pente rétrograde (l’amont est plus profond que l’aval). L’enfoncement du socle rocheux sous la calotte Nord Américaine en période glaciaire (isostasie) produit exactement cette configuration et c’est dans ces dépressions isostatiques qu’apparaissent les grands lacs proglaciaires.

Ces résultats nous permettent de revisiter les mécanismes à l’oeuvre au cours de la dernière déglaciation. Alors que la fonte de surface liée au réchauffement du climat était le principal mécanisme mis en avant pour expliquer le recul de la calotte Nord Américaine, nous avons pu montrer que les aspects purement mécaniques, c’est à dire indépendants du climat, peuvent aussi jouer un rôle capital.

L’obtention de ces résultats a été rendue possible grâce notamment à l’amélioration de la représentation des instabilités mécaniques qui peuvent survenir à la ligne d’échouage. Instabilités qui pourraient concerner une grande partie de l’Antarctique dans le futur.

 

Figure: Vitesses d’écoulement de la calotte Nord Américaine, représentées sur la topographie 3D pour deux périodes séparées de 1000 ans. L’instabilité se manifeste par un recul rapide de la ligne d’échouage et une accélération des vitesses d’écoulement.

Référence: A. Quiquet, C. Dumas, D. Paillard, G. Ramstein, C. Ritz, and D.M. Roche (2021): Deglacial Ice Sheet Instabilities Induced by Proglacial Lakes, Geophysical Research Letters, 48, e2020GL092141, doi:10.1029/2020GL092141.

M. Kageyama, dépêche du 07/05/2021
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