Modélisation du manteau neigeux sur les surfaces glacées avec le modèle de surface terrestre ORCHIDEE : application à la calotte glaciaire du Groenland

Modélisation du manteau neigeux sur les surfaces glacées avec le modèle de surface terrestre ORCHIDEE : application à la calotte glaciaire du Groenland

Le réchauffement climatique actuel accélère la perte de masse des glaciers et des calottes glaciaires. Au Groenland, les changements de masse sont désormais dominés par les changements du bilan de masse de surface (BMS) dus à l’augmentation de la fonte à la surface de la calotte. Pour améliorer les projections de l’élévation future du niveau de la mer, il est donc essentiel de disposer d’une estimation précise du BMS, qui dépend de la représentation des processus intervenant au sein du manteau neigeux.

Runoff
Figure : Distribution spatiale du ruissellement (en mm j-1) moyenné sur la période 2000-2019 et simulé avec MAR (a) et le modèle ORCHIDEE (b-e) en utilisant le schéma de neige à 3 couches et les paramètres d’albédo standard (b), le schéma de neige à 12 couches et les paramètres d’albédo standard (c), le schéma de neige à 12 couches et les paramètres d’albédo optimisés à l’aide d’une technique d’assimilation de données  (d), et le schéma de neige à 12 couches et les paramètres d’albédo obtenus après un étalonnage manuel (e).

Nous présentons ici les développements récents que nous avons réalisés pour appliquer le module de neige implémenté dans le modèle de surface ORCHIDEE aux glaciers et aux calotte glaciaires. Notre analyse porte principalement sur la capacité du modèle à représenter les processus liés à l’ablation. A l’échelle régionale, nos résultats sont comparés aux sorties du modèle atmosphérique régional MAR et aux produits d’albédo MODIS. En utilisant différentes paramétrisations de l’albédo, nous avons effectué plusieurs simulations en forçant le modèle de manteau neigeux par les sorties du modèle MAR sur la période 2000-2019. Nos résultats révèlent une forte sensibilité des composantes du BMS à la paramétrisation de l’albédo. Les résultats obtenus avec les paramètres d’albédo déduits d’une calibration manuelle présentent un très bon accord avec les sorties de MAR. Inversement, avec la paramétrisation de l’albédo utilisée dans la version standard d’ORCHIDEE, le ruissellement et la sublimation sont sous-estimés. Nous avons également testé l’impact des paramètres d’albédo provenant d’une expérience antérieure d’assimilation de données utilisant des produits MODIS sur les processus d’ablation. Bien que ces paramètres améliorent considérablement l’albédo modélisé sur l’ensemble de la calotte glaciaire, ils dégradent les autres résultats du modèle par rapport à ceux obtenus avec l’approche manuelle. Ceci semble être dû au fait que le modèle s’ajuste trop à l’ensemble des données d’albédo utilisées pour l’étalonnage sans aucune contrainte appliquée aux autres processus contrôlant l’état du manteau neigeux. Cela souligne la nécessité d’effectuer une optimisation « multi-objectifs » en utilisant des observations supplémentaires liées aux processus internes du manteau neigeux. Bien que des améliorations soient encore possibles, les développements rapportés dans la présente étude constituent une avancée importante dans l’évaluation du SMB du Groenland, avec une extension possible aux glaciers de montagne ou à la calotte glaciaire de l’Antarctique.

Auteurs : Sylvie Charbit, Christophe Dumas, Fabienne Maignan, Catherine Ottlé, Nina Raoult, Xavier Fettweis, et Philippe Conesa

Article : https://tc.copernicus.org/articles/18/5067/2024/