Thématiques de recherche

L’équipe ICOS-RAMCES (Réseau Atmosphérique de Mesure des Composés à Effet de Serre) coordonne le Service National d’Observation (SNO) des gaz à effet de serre, qui constitue la composante française du réseau européen ICOS (Integrated Carbon Observation System) pour l’atmosphère. Le SNO assure la mesure continue et haute précision des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O) et les scientifiques de l’équipe interprètent l’évolution et les variations de ces gaz dans le temps (de l’échelle journalière, à multidécennale), et dans l’espace (de l’échelle globale à l’échelle nationale, mais aussi à l’échelle de la ville et des sources locales d’émissions de ces gaz).

Suivi à long terme des gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O)

Le SNO-ICOS-France-Atmosphère représente l’un des plus importants réseaux de mesure des GES en Europe, et constitue à ce titre un apport essentiel à la détermination des bilans de GES sur le continent européen. Il représente la composante Française au réseau d’observation de l’infrastructure de recherche européenne IR* ICOS-ERIC. A ce jour le SNO ICOS-France-Atmosphère comprend 18 stations : 11 en France métropolitaine, 2 en Irlande (Mace Head) et Grèce (Finokalia), 4 dans les tropiques, et la station historique de l’Ile Amsterdam dans l’Océan Indien ou est mesuré le CO2 depuis 1980. Les stations sont décrites sur le site : https://sno-ifa.aeris-data.fr/

Les mesures de concentration de gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O) développées dans le SNO-ICOS-France-Atmosphère, selon les protocoles de l’infrastructure ICOS, sont des mesures in-situ dans la couche limite directement rattachées aux standards de l’Organisation Mondiale de la Météorologie. Ces mesures extrêmement précises (~0.05%) et réalisées en continue, sont indispensables au suivi à long terme des tendances des GES dans l’atmosphère, et de leurs variabilités interannuelles et saisonnières associées à des épisodes climatiques spécifiques affectant les flux naturels (e.g. sécheresse, incendies, …), ou à des crises affectant les émissions anthropiques (e.g. confinements COVID, fuite de gaz Nord-Stream, …).

Le suivi à long terme des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère vise à comprendre les cycles naturels de ces gaz, perturbés par les activités humaines, qui sont la première cause du réchauffement climatique. Les principaux gaz à effet de serre CO2, CH4 et N2O ont des émissions anthropiques liées à l’extraction et la combustion des combustibles fossiles, ainsi qu’au secteur agricole, qui se superposent à des sources et/ou puits naturels. La compréhension et l’évaluation du forçage radiatif de ces gaz requiert une connaissance des bilans de leurs sources et puits sur l’ensemble du globe à l’échelle régionale, et sur des échelles de temps mensuelles à décennales. Le défi pour un réseau de mesures atmosphériques est de disposer d’un maillage suffisamment dense et précis de l’atmosphère pour en déduire les flux de CO2, CH4 et N2O à une échelle spatiale permettant de différencier les contributions anthropiques, biosphériques et océaniques. Cela n’est possible actuellement avec des réseaux sols que dans certaines régions du globe, dont l’Europe où le nombre de stations est suffisamment dense. Pour les régions où la densification du réseau sol n’est pas possible (océans, zones tropicales) les satellites permettent en principe d’apporter une couverture globale ; cependant, leurs mesures sont limitées aux situations sans nuages et l’étalonnage et/ou la validation de ces données demeure un sujet de recherche, s’appuyant sur des données de télédétection depuis le sol ou des mesures de profils verticaux in-situ.

Vers un réseau intégré de mesure des GES

Les mesures de surface des gaz à effet de serre ne suffiront pas pour répondre aux besoins d’observation du réseau mondial, d’une part parce que certaines régions sont difficilement accessibles ou peu pourvues en infrastructure d’accueil, mais également parce-que les incertitudes des modèles de transport atmosphérique utilisés pour les inversions nécessitent des observations complémentaires qu’il s’agisse d’autres traceurs (e.g. radon, SF6, …), ou d’autres types d’observations. En particulier, la mesure de la distribution verticale des GES, est une information critique pour mieux comprendre les mécanismes de transport ou de chimie atmosphérique encore très mal représentés dans les modèles. Plusieurs techniques de mesure sont possibles (e.g. sondages à distance par télédétection, mesures in-situ aéroportée, prélèvements d’AIRCORE à partir de ballons) pour caractériser la distribution des GES dans l’atmosphère (colonnes totales / partielles, profils verticaux).

Notre stratégie pour optimiser la synergie entre les programmes d’observation des GES depuis la surface jusqu’au mesures satellites consiste à compléter le réseau de mesure de surface (ICOS) par deux approches qui ont fait la démonstration de leur maturité :

  • les mesures de colonnes totales par télédétection depuis le sol
  • les mesures de profil verticaux par l’approche de prélèvement d’AIRCORE sous ballon

La télédétection des gaz à effet de serre (GES) par spectrométrie à transformée de Fourier depuis le sol, permet d’obtenir leur colonne totale dans l’atmosphère, intégrée le long de la ligne de visée. Les mesures de colonnes sont non seulement complémentaires aux mesures in situ de surface en reliant ces mesures de surface aux mesures spatiales, mais elles permettent également de contrôler l’exactitude des mesures satellitaires. En effet, la visée directe du soleil pris comme source (télédétection TF depuis le sol), fournit un flux très important et un très bon signal sur bruit (mesure des GES dans le proche infrarouge, notamment CO2 et CH4). Ces mesures se font dans le même domaine spectral que celles qui sont acquises en absorption différentielle depuis l’espace par des spectromètres passifs comme GOSAT, OCO-2, GOSAT-2, OCO-3, MicroCarb ou par Lidar (MERLIN).

Le réseau TCCON (Total Carbon Column Observing Network) est le réseau de référence pour les mesures spatiales de CO2 et CH4, mais avec une 30aine de sites équipés de spectromètres à transformée de Fourier (FTIR) à très haute résolution spectrale, il est loin de répondre aux attentes en termes de répartition géographique. En raison de leur portabilité et de leur stabilité, les spectromètres EM27 offrent de nouvelles opportunités de déploiement dans des régions non couvertes par TCCON, ou pour densifier des réseaux régionaux, ou pour servir d’instrument d’intercomparaison et de transfert d’échelle des sites TCCON. L’Equipex OBS4CLIM a permis l’acquisition de 5 EM27 en cours de déploiement dans les zones tropicales et subtropicales. Trois instruments sont également installés en région parisienne dans le cadre d’ICOS-Cities

Afin de valider pleinement la colonne totale estimée (à partir de l’espace ou du FTS au sol) au niveau de précision requis par les études du cycle du carbone, il est nécessaire d’utiliser des mesures in situ indépendantes des profils verticaux de gaz, en particulier dans la région de la haute troposphère-basse stratosphère et au-dessus. Seules les mesures sous-ballons sont à même de répondre à ce besoin. L’utilisation d’instruments pouvant voler sous des ballons météorologiques avec une charge utile typiquement inférieure à 3 kg, tels les échantillonneurs atmosphériques AIRCORE.

Caractérisation des émissions urbaines

Les villes regroupent une part toujours croissante de la population mondiale. Elles contribuent pour près de 75% aux émissions globales de CO2 et sont donc devenues un objet d’étude majeur pour le suivi des gaz à effet de serre. Pour mesurer les GES en milieu urbain, il est nécessaire de s’adapter aux conditions du milieu comme par exemple une forte variabilité du signal, et des sources locales d’émission diversifiées. Cela implique souvent une adaptation du réseau d’observation avec un plus grand nombre de point de mesure. Un réseau de 7 sites de mesure des GES en région Ile de France est en place depuis 2015. L’équipe ICOS-RAMCES est impliquée dans le projet européen ICOS-Cities dont Paris est l’une des 3 villes pilotes (avec Munich et Zürich). Ce projet a permis de densifier le réseau de suivi du CO2 dans et autour de Paris avec désormais 10 sites d’observation à haute précision (0.1 ppm) et une trentaine de sites de moyenne précision (1 ppm) déployés sur les toits de Paris.

Caractérisation de hot-spot d’émission de gaz à effet de serre