Contamination des sols par les résidus de pesticides dans les sols français: vers une surveillance nationale ?

Claire, FROGER¹, Claudy, JOLIVET¹, Hélène Budzinski², Manon Pierdet², Giovanni Caria³, Nicolas P.A. Saby¹, Dominique Arrouays¹, Antonio, BISPO¹

¹ INRAE, UR Info&Sols, 45075 Orléans, claire.froger@inrae.fr

² Université de Bordeaux, EPOC-LPTC, UMR 5805 CNRS, 33405 Talence Cedex

³ INRAE, US0010 Laboratoire d’analyses des sols, 62523 Saint-Laurent-Blangy

La contamination de l’environnement par les résidus de pesticides fait depuis de nombreuses années l’objet d’une surveillance accrue de par leurs effets délétères sur la santé des écosystèmes. Cependant, contrairement aux milieux aquatiques et à l’atmosphère, il existe peu de données disponibles sur la présence des pesticides dans les sols. Or, les quelques études récentes sur le sujet démontrent l’omniprésence de nombreuses substances dans des sols, y compris des surfaces non traitées depuis longtemps, à des concentrations pouvant présenter des risques pour la biodiversité. L’objectif de ce projet prospectif, financé par l’Anses, était ainsi d’étudier la contamination de sols, prélevés dans toute la France issus de la campagne du Réseau de mesures de la qualité des sols (RMQS), et d’évaluer la faisabilité d’une surveillance à l’échelle nationale.

Cent onze molécules ont ainsi été analysées dans une cinquantaine de sols, sélectionnés parmi les sites du RMQS des années de collecte 2019 et 2020.  Les prélèvements de sols concernaient majoritairement des parcelles de grandes cultures, mais également quelques sites en forêts, prairies permanentes et friches.

Les résultats montrent l’omniprésence des substances, y compris dans les sols de forêts et prairies, puisque 98% de l’ensemble des sites présentaient au moins un résidu de pesticides. Au total 67 molécules ont été détectées sur les 111 recherchées, majoritairement des fongicides et des herbicides, ces derniers contribuant le plus aux concentrations totales présentes dans les sols. Le glyphosate et son principal métabolite l’AMPA sont présents dans 80% des sols, on retrouve également fréquemment de nombreux fongicides comme le fluxapyroxad, le fluopyram ou l’epoxiconazole, et des insecticides comme la tefluthrine ou l’imidaclopride (néonicotinoïdes). L’évaluation des risques de toxicité chronique pour les vers de terre indique un risque modéré à fort dans les sols de grandes cultures, posant la question de l’impact réel de ces substances sur les organismes du sol. Enfin, la comparaison avec les informations sur les traitements phytosanitaires, collectées auprès des agriculteurs, ont permis de mettre en évidence la présence de certaines substances au-delà des temps de dégradation théoriques et à des concentrations supérieures à celles attendues. Cette étude démontre ainsi l’intérêt d’une surveillance généralisée de ces substances dans les sols ainsi que la faisabilité technique de s’appuyer sur le RMQS pour le réaliser.

https://doi.org/10.1021/acs.est.2c09591
https://www.inrae.fr/actualites/persistance-residus-pesticides-sols-interet-dune-surveillance-nationale
https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/05/25/une-presence-generalisee-des-pesticides-dans-les-sols-agricoles-de-france-selon-une-etude-pilote_6174866_3244.html