L’équipe ICOS-RAMCES vient de publier les dernières mesures de CO2 et de CH4 dans l’atmosphère, révélant des niveaux sans précédent. Les données, issues du Service National d’Observation ICOS-France-Atmosphère (SIFA), l’un des plus importants réseaux européens de surveillance des gaz à effet de serre, mettent en lumière une situation préoccupante. Cette contribution française au réseau d’observation atmosphérique de l’infrastructure de recherche européenne ICOS-ERIC s’avère essentielle pour la détermination des bilans de gaz à effet de serre sur le continent européen.
Pour obtenir ces résultats, les scientifiques s’appuient sur un réseau de 18 stations de mesure, dont 11 en France métropolitaine, qui analysent en continu et selon des protocoles standardisés les concentrations de CO2, CH4 et CO, ainsi que divers paramètres météorologiques (vitesse et direction du vent, température, pression et humidité relative). Six de ces stations mesurent également les concentrations de N2O (protoxyde d’azote), dont les données seront prochainement disponibles sur le centre de données et services pour l’atmosphère AERIS. L’analyse des données jusqu’à fin mars 2024 révèle une augmentation ininterrompue des concentrations, en réponse directe à la croissance continue de la consommation mondiale de combustibles fossiles. Cette tendance est rythmée par des cycles saisonniers et des variations interannuelles liées aux échanges avec les réservoirs naturels comme les forêts, les sols, les zones humides et les océans, des processus que les scientifiques cherchent à mieux comprendre.
Les résultats sont particulièrement alarmants : la concentration de CO2 à l’île Amsterdam a franchi le seuil des 420 ppm1 , soit 24% de plus que les premières mesures effectuées sur cette île en 1980. Plus inquiétant encore, le taux de croissance annuel atteint un record de +3,7 ppm entre avril 2023 et avril 2024, dépassant le précédent record de +3,6 ppm observé en 2015-2016. Ces pics de croissance coïncident avec des épisodes El Niño2 , qui, en augmentant les températures mondiales, alimentent de nombreux événements extrêmes et perturbent les échanges de CO2 avec les écosystèmes naturels (sécheresses, incendies, etc.).
Ces perturbations climatiques se traduisent par une accélération temporaire de la croissance du CO2, qui s’ajoute aux émissions d’origine humaine responsables de l’augmentation des concentrations observée partout, y compris dans des observatoires très éloignés comme l’île Amsterdam et l’île de la Réunion. Du côté du méthane, les concentrations dépassent désormais 1850 ppb3 à l’île Amsterdam. Si sa croissance s’est modérée ces derniers mois (moins de 5 ppb/an), elle avait atteint des niveaux records entre 2020 et 2022 (plus de 15 ppb/an).
Cette accélération semble imputable à plusieurs facteurs, notamment d’importantes émissions des zones humides tropicales et une augmentation de la durée de vie du méthane dans l’atmosphère, cette dernière étant liée à la baisse des émissions d’oxydes d’azote pendant les confinements de 2020.
Les données sont accessibles sur le portail AERIS : https://sno-ifa.aeris-data.fr/en/homepage/
Contacts scientifiques : Michel Ramonet () et Morgan Lopez ()
Communiqué de presse du CNRS/INSU
https://www.insu.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/icos-france-atmosphere-les-gaz-effet-de-serre-battent-des-records-en-2024